L’ORIGINE DU NOM DE LA TRANCHE

La Tranche (puis La Tranche-sur-Mer depuis 1938) doit son nom à un phénomène naturel : l’invasion de la mer provoquant une coupure de la côte, une tranchée, qui a finalement donné le nom de La Tranche.

 

LA  GÉOGRAPHIE DE LA TRANCHE SUR MER

Le Paysage se compose d’une forêt domaniale à l’Ouest (forêt plantée au XIXe siècle), du marais (faisant partie du marais poitevin) au Nord et à l’Est, et d’un sol ancien recouvert de sable. Face à La Tranche, s’étend l’Ile de Ré qui représente une protection naturelle du littoral. Nous en sommes séparés par 12 à 15km de mer. Par beau temps, nous voyons très bien le pont de La Pallice, et à l’autre extrémité : le phare des Baleines. Entre nos deux rives, les fonds sont en général de 5m. Près du phare des Baleines s’étend la fosse de Chevarache, bien connue des pêcheurs professionnels et des plaisanciers. Il y a en fait 2 fosses, l’une de 62m de profondeur et l’autre de 24m.

L’HISTOIRE DE LA COMMUNE

Jusqu’en 1974, on disait de la commune qu’elle était de fondation récente, certains farceurs allant même jusqu’à affirmer que les premiers habitants descendaient de forçats évadés du bagne de Saint-Martin-de-Ré.
En 1974, nous avons eu la chance de découvrir fortuitement, à la Pointe du Grouin-du-Cou, c’est-à-dire à l’entrée du Pertuis, face au phare des Baleines, sous le sable de la plage, dans le sol mis temporairement au jour par la mer, des vestiges préhistoriques (poterie, silex, charbon de bois, matériel osseux). Les préhistoriens furent vivement intéressés par nos découvertes qui témoignaient d’une implantation humaine au Néolithique Ancien, entre
Loire et Gironde à la fin du 6ème millénaire avant J.C.

Les premiers habitants furent donc des colons venus d’Asie Mineure et des Balkans. Contournant la Péninsule Ibérique, après avoir longé les côtes méditerranéennes, ils sont arrivés ici, tandis que d’autres y parvenaient après avoir mis pied-à-terre dans le midi. Poursuivant nos prospections, nous avons répertorié des sites du néolithique moyen, du néolithique récent, de l’âge du cuivre, de l’âge du bronze, de l’âge du fer.

Les vestiges des premiers siècles de notre ère, puis ceux du Moyen Âge gisent sans doute sous nos pieds, dans le sable. A La Tranche, nous considérons les Rétais (habitants de l’île de Ré ) comme des cousins, tant les relations sont anciennes. La personne la plus illustre qui fit la traversée de l’île à La Tranche, fut une noble dame : Amable du Bois. Elle épousa Savary de Mauléon dans notre paroisse en 1226 (Savary de Mauléon, rappelons-le, Seigneur de Châtelaillon, de l’île de Ré, d’Angoulins, de Benon, de Mauléon, de Fontenay, de Marans, de Tallemont.. .). Tous les historiens ne sont pas d’accord pour situer ce mariage à La Tranche, quelques esprits chagrins contestent l’authenticité d’une charte d’époque. Nous n’entrerons pas dans leur futile querelle. Disons simplement que nous sommes reconnaissants envers ce puissant Seigneur qui a fait entrer le nom de notre commune dans l’Histoire. Sous Louis XI, La Tranche figurait parmi les ports et havres de la côte vendéenne. On y embarquait les bleds et vins du Bas Poitou. En face du bourg, à la Pointe du Chiquet, s’élevait avant la Révolution (la carte de Cassini nous le révèle) l’Auberge de la Côte, haut lieu probable des transactions commerciales de l’époque. D’autres constructions s’offraient à la vue des visiteurs : une église, un cimetière, un appontement. L’appontement, sorte d’épi en pierres de lest, tomba en ruines sous la Révolution par manque d’entretien. Les Tranchais adressèrent une supplique à Louis XVIII pour obtenir une aide financière afin de le reconstruire mais ils ne furent pas entendus. Quant à l’église du Xll ème siècle, la mer finit par l’emporter et le cimetière fut définitivement submergé (l’érosion marine ne date pas d’aujourd’hui).

 

LA VIE ÉCONOMIQUE 

En ce qui concerne la vie économique, nous pouvons dire que les habitants de La Tranche ont été aidés par la «providence» du XVll ème siècle à nos jours: Par exemple, c’est un notaire, Nicolas Herpin, qui vint au XVll ème siècle, établir des marais salants dans notre pays. La production du sel fut abandonnée par suite de la concurrence et en raison des travaux de dessèchement du marais au siècle suivant. Rien n’était cependant perdu puisque les Tranchais possédaient des sols de premier choix pour la culture de l’ail, de l’échalote, des haricots et plus tard, des pommes de terre … Ils exportèrent de grandes quantités de ces légumes aux XVlll ème, XIX ème et XX ème siècles. Mais pour réussir ce miracle, il fallait du courage, car tous les labours se faisaient à la pelle, à la force du poignet comme on dit. On utilise toujours cette pelle appelée fraiIle. Vers 1830, arrivèrent les premiers baigneurs. Cette mode tombait à point ; elle allait ouvrir de nouvelles perspective, donner de nouvelles cordes aux arc des autochtones. Il fallut recontruire l’église (1868), ouvrir de nouvelles routes. Le village, essentiellement agricole, changeait d’orientation : une station balnéaire venait de naître. Se débuts turent très lents en raison des difficultés d’accès. Le chemin de fer fut construit à l’écart du pays, desservant les viIIages situés à quelque 10 km de la côte. Dans le dernier quart du XXème siècle, la transformation, nous dirons la métamorphose fut spectaculaire.
Nous nous souvenons du temps où nous comptions sur les doigts des deux mains d’abord, puis sur ceux d’une main, les derniers cultivateurs.
Nous entendions de moins en moins résonner les sabots des chevaux ou grincer les roues de charrettes. Les voix des cultivateurs s’éteignaient les unes après les autres. On avait pourtant vu fleurir, au printemps, les tulipes, les jacinthes, les jonquilles, là où poussaient quelques années plutôt, l’ail, l’échalote, la pomme de terre…

 

LA PÉRIODE FLORALE DE LA TRANCHE 

L’épopée florale, à la Tranche Sur Mer, commence en 1952 avec un agronome hollandais nommé Johannes Matthysse qui a décidé de prospecter le littoral français dans l’espoir d’y trouver des sols, suffisamment ressemblant aux polders de Hollande pour se prêter à la culture des oignons à fleurs. Après de vaines recherches de la Normandie au pays basque, c’est par hasard qu’il atterrît à La Tranche sur mer. A peine arrivé, il procède sans coup férir aux premiers prélèvements. Le résultat des analyses le comble d’aise: ce qu’il découvre, c’est un sol merveilleusement idoine; non seulement sablonneux et calcaire selon les normes requises pour l’épanouissement des bulbes, mais aussi irrigué par infiltration en provenance des marais voisins, qui maintiennent très régulièrement le niveau d’eau idéal : à 70 centimètres, bien comptés, de la surface. Site charmant enfin : dans cette découpure vendéenne, si justement nommée «LA TRANCHE» pour son profil promontoire, oui, la voilà bien la parcelle avantageuse, promise aux féeries florales! Le soir même son camarade resté en Hollande recevait un télégramme aussi bref que prometteur: «Euréka» signé Matthysse. Mais le cadre humain, pour l’instant, est beaucoup moins accommodant et il faudra aux deux pionniers nordiques une courageuse patience pour venir à bout de toutes les incompréhensions. Nos deux étrangers ont pu prendre en location un modeste quadrilatère de dix mètres de côté. Les commentaires allaient bon train dans toute la région de La Tranche. On commença à discourir sur les charmes des glaïeuls et des narcisses, puis des jacinthes, des crocus et des amaryllis. Et le jour vint où il fut créé, en 1955, avec huit adhérents fondateurs, la «coopérative d’oignons à fleurs de la côte de Lumière».

Douze ans plus tard cette société comptait déjà plus de 120 membres producteurs … Puis fut crées le Parc Floral (les floralies) et la Fête des fleurs (corso fleuri) Mais le déclin de l’agriculture était inévitable. La coopérative des oignons à fleurs ferma ses portes en 1990. Forte de 120 coopérateurs en 1955, elle n’en comptait plus que 43 en 1988 et la moyenne d’âge était de 55 à 60 ans. Les profits aléatoires tirés des activités agricoles, la pression exercée par les promoteurs à la recherche de terrains à bâtir, ajoutés au «manque de bras» furent les raisons de ce déclin. Aujourd’hui, La Tranche a gardé une partie de son parc floral. 2800 personnes y vivent, toute l’année. Il y a dans la commune près de 7 000 résidences secondaires, 306 chambres d’hôtel, 4224 emplacements de camping … ajoutons que La Tranche vient d’être classée dans la catégorie des villes touristiques de 40000 à 80000 habitants en raison de l’afflux des mois d’été (environ 100000 touristes). La Tranche est la 4ème station balnéaire en Vendée; elle représente 10% de la capacité d’accueil du département.

Extrait de l’exposé de Michel BOIRAL
de la Société d’Ethnologie
le 4 juin 2000, La Tranche sur mer

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